Il est là, pile devant vous, quand vous descendez les marches du centre sportif d’Auderghem, poché sur la rampe en béton qui finit la chaussée de Wavre et lance enfin le viaduc vers l’autoroute E411. Situation incongrue car il n’y a pratiquement (et bizarrement) aucune activité d’art urbain à cet endroit, les fresques commissionnées du boulevard du Souverain s’étant en effet arrêtées bien des traverses en amont … Application incongrue parce que le pochoir a été exécuté en deux versions, un négatif et un positif … précédées elles-mêmes sur leur gauche par deux essais partiels et ratés. Sujet incongru aussi car le portrait illustré est celui d’un officier allemand de la seconde guerre mondiale. Pas le brave gendarme de l’émission Contact ou le flic de quartier rondouillard et sociable … Non non, un vrai et distinct nazi, le doigt bien menaçant ! Alors, on se gratte la tête sur la raison de cette proximité … Nazisme et sport … Mouais, il y a bien les jeux olympiques à Berlin en 1934 que l’ami Adolf récupéra pour faire la propagande de sa race aryenne toute en yeux bleus, cheveux blonds et muscles roses. On peut aussi imaginer un jeune gaillard un peu artiste et réglant ses comptes à coup de pochoir avec un arbitre ou un juge borderline trop sévère lors d’une compétition sportive … Rien de bien convaincant, cependant … Le lien est peut-être ailleurs, dans ce qui a précisément rendu le portrait si reconnaissable : l’uniforme.
Moyen inventé naguère pour distinguer les civils des soldats et les soldats du bon côté de ceux du mauvais côté, l’uniforme est devenu un signe-code puissant de notre société. Tradition, discipline, honneur, respect mais aussi égalité (tout le monde looks le same en uniforme … surtout les aryens) et appartenance sécurisante à un groupe, le nombre de signifiants socio-culturels (et sexuels) associés à l’uniforme est follement dingue. Et l’effet de code est encore sur-amplifié jusqu’au dégoût chez les copains d’Adolf … On y ajoute la torture, l’horreur, l’extermination. Regardez-le, notre officier poché, éructant et harang(u)ant dans son fringant uniforme Hugo Boss … (silence) … Ben, oui, Hugo Boss … Membre notoire du Parti Nazi dès 1931 (un précoce !) c’est lui qui créa et confectionna les uniformes des officiers de la Schutzstaffel et de la Wehrmacht de 1932 à 1945 … (silence gêné) … Saviez pas ? Et comme notre Hugo Boss de maintenant a une ligne-signature de vêtements de sport à son nom, tout colle. Alors, le pochoiriste qui récupère l’imagerie symbolique nazie dans son maraudage graphique se trimballe-t-il en costard Hugo Boss le jour et en training Hugo Boss la nuit ? Qui sait … Moi,en tout cas, je m’en tiens à mon sent-bon du moment (XY de Hugo Boss) et j’espère ne jamais trouver d’autres pochoirs de ce genre dans les rues de Bruxelles. Parce que si la technique du pochoir permet sa répétition uniforme, la répétition des uniformes par le pochoir nous donnerait un p'tit coup d'extrême-droite plutôt malvenu. En positif comme en négatif.
samedi 31 janvier 2009
dimanche 25 janvier 2009
De la chiralité féminine
Parce qu’elle fait partie de l’iconographe cinématographique universelle,
Holly Golightly figure en bonne place, et à juste raison, dans le hit-parade des portraits les plus pochés dans le monde. En témoignent notamment les making-offs de Twan87 sur youtube et de Barto sur metacafe, tous deux propices à l’émulation. Parce qu’Audrey (Kathleen Ruston) Hepburn - l’actrice qui interprète Holly dans le film « Breakfast at Tiffany’s / Diamants sur canapé » de 1961 - est née à Bruxelles, il était tout aussi juste et bon qu’un artiste entreprenne (enfin) la pochoirisation de ce légendaire portrait dans les rues de la capitale … C’est vgt qui s’en est chargé ! Et, en un curieux écho à la déclaration d’Audrey Hepburn qu’il avait été difficile pour elle, d’un caractère très introverti, de jouer un personnage aussi extraverti qu’Holly, le pochoir de vgt existe en deux versions : in et ex. Ainsi, une version « outdoor » se trouve actuellement sur une palissade de la rue Saint-Ghislain dans les Marolles tandis qu’une version «indoor » orne le mur d’une chambre d’une maison dans la périphérie bruxelloise. A la tension surchargée et urgente d’une performance extérieure et publique (vent, pluie, froid, flics, stress) contraste l’application recueillie et méticuleuse d’une commande intérieure et privée (calme, propre, sec, chaud, cool). Et parce que les circonstances ambiantes sont clairement différentes, l’alternance gauche - droite est plus qu’une simple symétrie … Elle rend ces portraits précieusement énantiomères.
Dans les deux cas, le résultat est magnifique. Coiffure, parure, grâce et pose, tout est là pour charmer le quidam. Et c’est bien de cela qu’il s’agit, n’est-ce pas … De la féminine propension à troubler l’innocent et le brave. Posons-nous d’ailleurs la question : quel moteur dramatique autre que celui de l’exercice du charme et de la séduction aurait-il pu mieux pousser Holly et Audrey au travers de leurs synopsis respectifs ? Paul, José, Rusty pour le rôle, James, Mel et combien d’autres pour l’actrice … Quelle acuité graphique, alors, dans l’émotion et l’émoi de ce double rappel mural, affiché au dehors (le rôle) comme au dedans (l’actrice) ! En conclusion, et je vous en fiche mon billet … J’ai la diable d’impression que vgt ne peut être qu’une jeune femme pour réussir à nous interpeller ainsi avec autant de talent et de beauté. Fille(s) et pochoiriste(s) … Juste ce qu’il faut pour rendre Bruxelles la plus belle ville du monde.
Holly Golightly figure en bonne place, et à juste raison, dans le hit-parade des portraits les plus pochés dans le monde. En témoignent notamment les making-offs de Twan87 sur youtube et de Barto sur metacafe, tous deux propices à l’émulation. Parce qu’Audrey (Kathleen Ruston) Hepburn - l’actrice qui interprète Holly dans le film « Breakfast at Tiffany’s / Diamants sur canapé » de 1961 - est née à Bruxelles, il était tout aussi juste et bon qu’un artiste entreprenne (enfin) la pochoirisation de ce légendaire portrait dans les rues de la capitale … C’est vgt qui s’en est chargé ! Et, en un curieux écho à la déclaration d’Audrey Hepburn qu’il avait été difficile pour elle, d’un caractère très introverti, de jouer un personnage aussi extraverti qu’Holly, le pochoir de vgt existe en deux versions : in et ex. Ainsi, une version « outdoor » se trouve actuellement sur une palissade de la rue Saint-Ghislain dans les Marolles tandis qu’une version «indoor » orne le mur d’une chambre d’une maison dans la périphérie bruxelloise. A la tension surchargée et urgente d’une performance extérieure et publique (vent, pluie, froid, flics, stress) contraste l’application recueillie et méticuleuse d’une commande intérieure et privée (calme, propre, sec, chaud, cool). Et parce que les circonstances ambiantes sont clairement différentes, l’alternance gauche - droite est plus qu’une simple symétrie … Elle rend ces portraits précieusement énantiomères.
Dans les deux cas, le résultat est magnifique. Coiffure, parure, grâce et pose, tout est là pour charmer le quidam. Et c’est bien de cela qu’il s’agit, n’est-ce pas … De la féminine propension à troubler l’innocent et le brave. Posons-nous d’ailleurs la question : quel moteur dramatique autre que celui de l’exercice du charme et de la séduction aurait-il pu mieux pousser Holly et Audrey au travers de leurs synopsis respectifs ? Paul, José, Rusty pour le rôle, James, Mel et combien d’autres pour l’actrice … Quelle acuité graphique, alors, dans l’émotion et l’émoi de ce double rappel mural, affiché au dehors (le rôle) comme au dedans (l’actrice) ! En conclusion, et je vous en fiche mon billet … J’ai la diable d’impression que vgt ne peut être qu’une jeune femme pour réussir à nous interpeller ainsi avec autant de talent et de beauté. Fille(s) et pochoiriste(s) … Juste ce qu’il faut pour rendre Bruxelles la plus belle ville du monde.
samedi 24 janvier 2009
XTD, un nouvel acronyme mortel ...
Inconscients de leur mortalité, les jeunes prennent des risques insensés avec leur santé. Ils bouffent, fument, boivent, sniffent, baisent … négligent leur hygiène capillaire et ne changent de chaussettes que trop irrégulièrement. Que dire alors de nos street artistes manieurs de bombes aérosols ? Ceux-ci s’exposent en effet, dans la pratique de leur noble art, à l’inhalation et à l’absorption de quantités appréciables (!) de substances hautement dangereuses. Arsenic, mercure, plomb, toluène … et notre favori toutes catégories, le xylène, aussi connu sous le doux synonyme de xylol. Dans son cocktail isomérique m-o-p, notre ami pétro-chimique est, à lui tout seul, capable de provoquer bien des maux : irritations des yeux et de la peau, troubles gastro-intestinaux, nausées et vomissements, vertiges, étourdissements, évanouissements … Bref, que de la joie. Preuve ironique que tout est dans tout, aussi certain que la peinture est dans la bombe, Montana Allemagne et MTN Espagne se tapent d’ailleurs sur la gueule à coups d’allégations toxicologiques. Alors, n’est-ce pas l’indéniabilité - voire l’addiction - de cette menace insidieuse qui attire graffeurs, taggeurs et pocheurs vers l’outil de leur art illicite … N’est-ce pas une défiance de plus, un acte de rébellion de trop, que d’ajouter volontairement l’empoisonnement des molécules de solvants dans les neurones de l’artiste à l’écrasement des particules colorées sur le support choisi ? Car il serait bien illusoire, n’est-ce pas, de croire que nous pourrions convaincre nos petits brigands de se munir de gants, masques, lunettes et autres salopettes lors de leurs performances urbaines. L’acte artistique, surtout s’il est violent et radical, s’accompagne toujours d’un potentiel de souffrance et de peine. Sinon, cela ne serait pas drôle. On peut néanmoins se réjouir que le gamin poché ci-contre et saisi en flag’ avec sa bombe sur un mur de la rue Goffart ait pensé à se protéger le scalp d’un couvre-chef à la mode … A moins que, hélas, l’ajout d’ailes dans son dos ne nous signale en réalité un sévère cas de xyloled-to-death. Le pochoir est un art dangereux ... Please, prenez-vos précautions.
jeudi 1 janvier 2009
Bon PLIP 2009 !
Entre deux tranches de bons vœux et de faux gras, les médias nous ont bassiné les yeux et les oreilles avec le bilan de première année du Plan de Lutte contre les Incivilités en matière de Propreté publique (PLIP) à Bruxelles. En un an, 71 procès-verbaux portant sur environ 525 actes de salissures graphiques ont ainsi été dressés et, grâce à un nouvel article du Code Pénal complétant une nouvelle loi communale (bigre, quelle frénésie d’innovation), communiqués au Parquet. Déjà 17 mises à disposition du Parquet ont été prononcées depuis fin 2007. Alors, le pochoiriste surpris en train de pocher un pochoiriste en train de pocher (comme celui-ci, trouvé rue Van Artevelde) ? Crack dedans, mon jeune ami, en tôle ! Parce que, oui, Mesdames et Messieurs, les graffitis sont un réel fléau ! Oui, ce sont les graffitis, et leurs auteurs, qui alimentent le sentiment d’insécurité accablant nos braves concitoyens bruxellois ! Humour, humour … Parce que dans une ville qui a été à ce point mutilée, massacrée, martyrisée par les promoteurs et spéculateurs immobiliers depuis tant d’années - avec la complicité bienveillante de nos dévouées autorités élues - il est complètement hallucinatoire de condamner à l’amende et à l’emprisonnement les artistes qui dénoncent le scandale premier de Bruxelles … Avant le graffiti est la bruxellisation / verbrusseling … Honteux terme utilisé par les urbanistes et architectes du monde entier pour désigner le saccage d’une superbe ville ancienne par une bande de fous immobiliers, privés et publics. C’est parce qu’il y a bruxellisation / verbrusseling qu’il y a graffiti. D’ailleurs, regardez autour de vous, la plupart des graffitis ne sont-ils pas apposés sur des façades d’immeubles abandonnés à la pourriture spéculative (portes et fenêtres aveuglées par des blocs de béton, palissades et panneaux cloués en quinconce) ou sur des façades d’immeubles récents dont l’esthétique hygiéniste est aussi laide que nulle ? Alors qui est l’incivique ? Qui est le véritable responsable de l’insécurité urbaine ? Sont-ce vraiment un tag ici, un graff là et un pochoir un peu plus loin qui nous fichent la trouille de devoir marcher au travers du quartier européen ou le long de la jonction nord-midi ? Pompeuses et pompantes balivernes … Arrêtons de confondre (sciemment) cause et conséquence, voulez-vous.
Et puisque nous apprenons qu’en 2009, les brigades policières du PLIP bénéficieront d’une formation « Propreté », pourrions-nous, en ce premier jour de l’an neuf, également leur suggérer de prendre quelques cours de pochoir ? A voir en effet comment la police poche son propre nom sur ses panneaux de signalisation mobiles (comme dans l’exemple ci-contre pris à Saint-Gilles), il est clairement temps de sensibiliser la maréchaussée à la beauté et à la difficulté de l’art qu’elle est en charge de réprimer.
Et puisque nous apprenons qu’en 2009, les brigades policières du PLIP bénéficieront d’une formation « Propreté », pourrions-nous, en ce premier jour de l’an neuf, également leur suggérer de prendre quelques cours de pochoir ? A voir en effet comment la police poche son propre nom sur ses panneaux de signalisation mobiles (comme dans l’exemple ci-contre pris à Saint-Gilles), il est clairement temps de sensibiliser la maréchaussée à la beauté et à la difficulté de l’art qu’elle est en charge de réprimer.
Inscription à :
Articles (Atom)